Efficacité énergétique des projets d'indoor farming
L'empreinte énergétique des fermes indoor soulève des préoccupations quant à leur impact environnemental et à leur viabilité économique, surtout lors de fluctuations importantes des prix de l'électricité. Chez Orius, nous nous engageons à construire des systèmes économes en énergie et à utiliser les dernières technologies pour les améliorer continuellement. Nous développons également des solutions pour réduire la consommation d'énergie dans la production de cultures en environnement contrôlé. Dans cet article, nous partagerons nos réalisations ainsi que notre feuille de route pour un avenir plus économe en énergie.
Nos performances actuelles
Une BiomeboxⓇ comprenant une surface de culture de 10 m² répartie sur 4 étages consomme environ 23 kWh d'électricité par jour, soit environ 7 500 kWh par an avec une taux d'utilisation de 90% (11 mois par an) et des conditions standards de 250 µmol/s/m² PPFD, une photopériode de 16 h/day, une température de 20°C et une humidité relative de 70%.
Les chiffres ci-dessous sont fournis pour cette application type. En effet, le rendement et les conditions de croissance varient d'une application à l'autre ; une PPFD plus élevée augmenterait la consommation, tandis qu'une température et une humidité cibles plus élevées la réduiraient généralement.
En prenant ces hypothèses, la consommation quotidienne d'une BiomeboxⓇ se répartit comme suit :
- 60% = 14 kWh/day consommés par l'éclairage
- 30% = 7 kWh/day consommés pour le contrôle climatique
- 10% = 2 kWh/day consommés par les pompes d'irrigation et les équipements de traitement de l'eau, de fertigation et d'automatisation
Cela équivaut à un total d'environ 700 kWh d'électricité par mois complet, pour un budget entre 50 et 150€ par mois selon le type de contrat.
Notre recette pour améliorer l'efficacité énergétique
Comme le montre la répartition précédente, la consommation d'énergie de systèmes indoor dépend beaucoup de l'utilisation du système d'éclairage et de contrôle climatique.
Tout d'abord, nous sélectionnons avec soin nos systèmes LED. Nous utilisons les meilleures puces disponibles et des luminaires avec un design thermique optimisé, afin de produire le plus de photons utilisables possible par kWh d'électricité et limiter la chaleur perdue. Les éclairages LED ne doivent pas seulement être économes en énergie, mais aussi avoir une longue durée de vie. En choisissant des équipement avec une longue durée de vie, nous obtenons un coût total de possession optimal ainsi qu'un impact environnemental réduit. Choisir des luminaires peu cher à l'achat peut être contreproductif. Ils peuvent générer à l'usage, des coûts additionnels en raison de leur faible efficacité et de la dégradation de la production de photons au fil du temps. En effet, pendant sa durée de vie, environ 80 % du coût total d'un éclairage LED provient de l'électricité qu'il consomme. La capacité d'ajuster dynamiquement le spectre lumineux est aussi un levier pour optimiser la consommation d'électricité. Il est ainsi possible d'utiliser des profils d'éclairage personnalisés pour répondre aux besoins des cultures à un instant T. De plus, pour des PPFD élevés (> 800 µmol/s/m²), nous avons opté pour des luminaires refroidis par eau afin d'éliminer la perte de chaleur de l'environnement de culture directement à la source. Cela nous permet de maintenir la température et l'humidité au niveau souhaité, d'éviter les microclimats et d'économiser de l'énergie.
Concernant le contrôle climatique, nos systèmes utilisent des pompes à chaleur multi-tuyaux qui génèrent simultanément de l'eau chaude et de l'eau froide avec une haute efficacité énergétique (TER 8). Ce process de refroidissement et de déshumidification que nous avons déjà mis en place dans nos Biomebox et dans nos chambres de culture, est une première étape pour de plus grandes installations. Ce système nous offre de nombreux avantages : un contrôle climatique le plus stable possible, une recirculation complète de l'eau et du CO2, la possibilité de mesurer en temps réel l'absorption de CO2 et de l'ETP, ainsi que la possibilité de contrôler facilement la pression dans les unités de culture quand cela est nécessaire.
Comparés à la lumière et au système de climatisation, les autres équipements tels que les pompes ou les dispositifs d'automatisation consomment peu d'électricité. Toutefois nous mettons toujours en oeuvre des solutions pour les rendre plus efficaces. Par exemple, toutes les pompes d'irrigation et de circulation sont équipées de variateurs de fréquence pour optimiser la consommation d'énergie en fonction des besoins en débit d'eau. A mesure que nos installations de culture se développent, la consommation électrique de ces dispositifs auxiliaires tend à représenter une part plus réduite du total, mais les économies d'échelle ont peu d'impact sur l'empreinte énergétique de l'éclairage et du CVC (chauffage, ventilation et climatisation).
Perspectives d'améliorations à court terme
Les performances énergétiques des semi-conducteurs des LED progressent constamment et les fabricants de puces devraient améliorer la consommation d'énergie de leurs composants d'environ 3 % par an grâce à des améliorations techniques - même si une barrière physique sera atteinte à un certain point dans le futur (l'efficacité photoélectrique maximale est estimée à environ 4,2 µmol/J). Cela laisse une marge de progression pour les technologies actuelles d'environ 25% d'économies d'énergie potentielles. De plus, les économies d'énergie réalisées sur l'éclairage permettent aussi de réduire la charge thermique dans l'environnement de culture, réduisant la demande d'énergie du système climatique.
Utiliser l'environnement extérieur pour capter gratuitement la lumière et la chaleur est également une solution pour réduire davantage la consommation électrique. Il s'agit souvent d'opportunités liées à l'emplacement du projet et aux paramètres de culture. Par exemple, le système climatique peut facilement être équipé d'un système de refroidissement gratuit, qui peut économiser jusqu'à 30 % de la consommation d'énergie globale en fonction de la localisation du projet. Dans les régions les plus au nord, nos installations pourraient pratiquement être climatisées gratuitement en captant les frigories de l'air extérieur.
Les fibres optiques ont déjà été envisagées comme un moyen d'apporter de la lumière gratuite dans l'environnement, mais la solution n'est pas encore mûre industriellement. Elle pose des défis supplémentaires en ce qui concerne la lumière infrarouge et UV, en plus de son coût d'investissement élevé par rapport au photovoltaïque. Le photovoltaïque est déjà une solution très intéressante. Sous les latitudes françaises, 18 panneaux solaires (surface totale de 36 m²) pourraient générer chaque année la quantité d'électricité nécessaire pour alimenter une BiomeboxⓇ de 10 m², pour un budget d'environ 10 k€. Le retour sur investissement serait atteint sous 5 à 15 ans, en fonction de l'évolution des prix de l'électricité. Cela est particulièrement pertinent si l'installation est implantée dans un bâtiment dédié, dont le toit peut être équipé d'une installation photovoltaïque.
D'autres synergies possibles pourraient inclure la valorisation de l'électricité résiduelle, du froid/chaud et du CO2 provenant d'une usine industrielle voisine. Néanmoins, les producteurs en serre bénéficieront davantage de ces opportunités, car la chaleur basse température est généralement la seule source d'énergie fatale qui n'est pas encore valorisée, tandis que les installations de culture indoor ont principalement besoin de lumière et de refroidissement. D'autre part, la valorisation des déchets verts des installations indoor sous forme de biogaz a peu de chances de compenser significativement la consommation d'énergie, car sa contribution serait négligeable.
Les processus biologiques comme la photosynthèse limitent l'efficacité énergétique de la culture indoor : pour la plupart des cultures, seulement 1 à 5 % de l'énergie reçue par une plante sous forme de lumière est transformée en masse organique. De plus, seule une fraction de cette matière est comestible ou utilisable. Cela signifie que le potentiel d'amélioration reste considérable. Cependant, l'efficacité de la conversion de la biomasse est limitée par la génétique et ne peut pas simplement être modifiée par l'ingénierie.
Notre stratégie pour que la production indoor soit plus économe en énergie
Nous préférons ne pas parier sur des avancées technologiques hypothétiques ou des opportunités locales pour réduire la demande en énergie par kilogramme de biomasse produite. Notre démarche consiste à exploiter les technologies d'agriculture en environnement contrôlé pour augmenter significativement la quantité de nutriments et de composés chimiques produits dans les plantes et autres organismes. Nous souhaitons développer des systèmes de culture d'ingrédients à haute valeur ajoutée, à l'échelle industrielle, qui utilisent le minimum d'intrants et d'énergie. C'est de cette façon que nous proposerons des systèmes de culture économes en énergie.
Se concentrer uniquement sur l'amélioration de l'efficacité des équipements n'est pas suffisant. Les barrières physiques imposent des limites strictes. Obtenir un joule de photons nécessitera toujours plus d'un joule d'électricité. En revanche, si nous pouvons augmenter significativement la quantité de matière utile obtenue avec une quantité donnée de temps, d'espace et d'intrants, nous pourrons mettre en place des processus de production très efficaces nécessitant moins de matériaux et d'électricité pour le même résultat. C'est pourquoi nous nous concentrons sur des solutions visant à augmenter le rendement net, ce qui réduira progressivement les préoccupations liées à l'énergie.
Pour y parvenir, nous comptons sur la capacité de nos systèmes à piloter les cultures grâce à un contrôle de l'environnement d'une précision inégalée. Nous fournissons aux chercheurs et aux producteurs des moyens de comprendre précisément ce qu'il se passe dans la plante au delà du seul niveau environnemental (les approches actuelles mesurent principalement la température, l'humidité et le CO2). Se limiter à des observations au niveau environnemental ne donne qu'une vision superficielle de la manière d'interagir avec les facteurs biotiques et abiotiques responsables des processus biologiques recherchés et de l'augmentation des rendements.
Nous pensons qu'une approche visant à maîtriser totalement les facteurs environnementaux est la plus à même de pouvoir augmenter les rendements et la qualité d'ingrédients à haute valeur ajoutée. Les systèmes hydroponiques ouverts peuvent être pertinents pour produire des cultures de qualité à grande échelle, mais ils n'ont pas assez de maîtrise, de contrôle et de stabilité pour développer des applications plus avancées. Prochainement, nous vous expliquerons comment nous avons appliqué cette vision dans des projets concrets et viables.